Si la fibromyalgie était un titre de film, ce serait "cris et chuchotements".
"Cris" car la douleur donne envie de hurler du plus profond de soi avec toute sa force et sa hargne, d'expulser cette rage qui nous anime face à l'injustice à laquelle nous devons faire face en permanence.
"Cris" car celle que j'appelle mon ennAmie, mélange d'ennemie et d'amie, impulse une espèce de révulsion et de colère dans les discussions et les échanges avec nos proches, ami(e)s, médecins, collègues, patrons, et j'en passe.
"Cris" car nous n'avons de cesse de crier nos maux et de crier à la face du monde que nous ne sommes pas des pestiférés, que notre "alien" n'est pas psychologique comme on aimerait tellement nous le faire croire.
"Cris" car même entre fibros l'incompréhension peut se révéler pire que des attaques extérieures, au lieu de trouver du soutien et le calme.
"Cris" car on cherche à nous faire avaler tout et n'importe quoi sur certaines causes possibles de la fibro qui de toute façon ne trouvent aucun fondement pour l'instant et ne donnent lieu qu'à des échanges musclés ridicules et stériles.
"Chuchotements" car la honte de parler de notre maladie, d'évoquer ce nom qui ne se dit pas à gorge déployée "fibromyalgie", nous étreint à chaque fois. Chuchotement, le résultat de la peur et de l'angoisse d'en parler à un nouvel interlocuteur dont on ne connait pas encore la réaction.
"Chuchotements" car nous ne voulons pas être un fardeau pour ceux que l'on aime, au risque de nous abîmer un peu plus.
"Chuchotements" car nous cherchons à ne pas montrer un visage douloureux, mais au contraire à présenter un visage souriant et préserver aussi une part de notre dignité que la maladie nous enlève avec force.
"Chuchotements" car nous ne souhaitons pas subir les affres de l'angoisse à chaque fois que nous voulons souscrire un contrat, acheter à crédit, et que la fibro se trouve refusée systématiquement.
"Chuchotements" car bien que la fibromyalgie ne soit pas une maladie honteuse, nous n'avons de cesse de nous justifier, de vouloir prouver qu'elle existe, alors que la science sait depuis 200 ans que cette pathologie existe réellement.